HISTORIQUE
par : Florence et Jean-Claude LAMBERT
et Bruno GUIGNARD,
Notre-Dame des Aydes une école, une histoire, 2018
et par : Frédéric-Gaël THEURIAU
enseignant de français
École devenue lycée après les diverses évolutions de l’âge des élèves scolarisés et des dénominations administratives, Notre-Dame des Aydes s’inscrit dans l’histoire de l’éducation, de la ville de Blois et du diocèse.
Son 150e anniversaire fut récemment célébré en présence de personnalités départementales et nationales.
L’Institution peut aussi s’enorgueillir d’avoir eu des figures de renom et de mérite comme le Chanoine Millet, le Père Victor Dillard, Monseigneur Claude Picard ou le Bienheureux Christophe Lebreton.
FONDATION
UN DEFAUT D’INSTRUCTION À BLOIS
À Blois, au milieu du XIXe siècle, les enfants dont les parents souhaitaient une éducation chrétienne, commençaient leurs études au Petit Séminaire Saint-Louis sous la direction de l’Abbé Le Chevalier. Mais les classes n’allaient pas au-delà de la sixième. Parallèlement, le Petit Séminaire Saint-François, situé à l’ancien couvent des Minimes, l’actuelle École de Musique et des Beaux-arts, accueillait des élèves dans le but de former de futurs ecclésiastiques.
Ainsi, les écoliers de Saint-Louis ne désirant pas s’engager dans le sacerdoce ne pouvaient poursuivre à Saint-François trop petit pour les accueillir et sans extension possible au grand regret de son supérieur, l’abbé Paul Millet. Le collège le plus proche était celui de Pontlevoy situé à 25 kilomètres au sud de Blois. Afin de répondre à une demande de plus en plus grande des parents, l’abbé réfléchit aux solutions à trouver : un emplacement stratégique, un financement important, et une administration diocésaine.
L’ÉLÉMENT DÉCLENCHEUR
Un jour de 1868, en face du Séminaire Saint-François, l’Évêché se rendit acquéreur d’un ancien pensionnat de jeunes filles avec l’intention d’en faire un lieu de retraite pour les prêtres infirmes. Comme il ne s’en présenta aucun, les locaux vétustes restèrent inexploités. L’abbé Millet eut soudain l’intuition révélatrice qu’une opportunité se présentait. Il imaginait la remise en état de dortoirs, de réfectoires, de salles de classes et d’études.
Bravant les détracteurs et les difficultés diverses, soutenu par son directeur et conseiller spirituel le Révérend Père Fessard, il obtint un plan de financement pour acheter le bâtiment et les autorisations nécessaires au projet. Après une prière à la Sainte Vierge le 30 juin 1868, au sanctuaire de Notre-Dame des Aydes, situé à Blois au sud de la Loire dans l’église Saint-Saturnin, l’évêque autorisa l’ouverture de l’établissement qui prit donc naturellement le nom de Notre-Dame des Aydes.
Les premiers élèves firent leur entrée dans les lieux en octobre 1868. L’école recruta parmi les élèves du séminaire Saint-Louis et dans la bourgeoisie chrétienne de Blois et des départements alentours. La bénédiction solennelle de la maison eut lieu le 1er mai 1869. Au milieu d’une illumination brillante et d’une procession de professeurs et d’élèves, on inaugura la statue de la Vierge, précisément de Notre-Dame de Lourdes, qui devait présider aux jeux.
AU FIL DU TEMPS
LA CHAPELLE
La chapelle, construite en 1884, était provisoire et destinée à devenir une salle de sport… mais la chapelle définitive n’a jamais été construite. Entre 1898 et 1910, des vitraux furent ainsi installés grâce à de nombreux donateurs. Deux vagues de restaurations survinrent ensuite.
La première eut lieu en 1953 grâce au directeur de l’époque, Monseigneur André Charrat, avec les faibles moyens qui restaient de l’après-guerre. La seconde arriva à partir de 2005 afin de réparer les outrages des mauvais temps. Les dons providentiels d’anciens responsables de l’établissement permirent la restauration complète du système électrique et de chauffage. L’apport de pièces de mobilier par les sœurs franciscaines agrémenta utilement l’espace. Enfin, la donation, par la famille Ranguin, d’un grand vitrail placé au centre du chœur derrière l’autel acheva son organisation. La rénovation fut effectuée en 2008 selon la volonté formulée par feue Brigitte Goin puis inaugurée par Monseigneur de Germiny.
L’ANNEXE
L’école Victor Dillard, rue de la Paix, dont le nom fut donné en l’honneur du Père jésuite mort au camp de Dachau en 1945, fut rattachée au Collège de Notre-Dame des Aydes en 1981 pour accueillir le primaire. Le lieu accueillit ensuite les 6e et 5e en 1998, favorisant ainsi le développement des classes de lycée dans le bâtiment Christophe Lebreton. Ce bâtiment, construit sur le site principal, rue Franciade, est inauguré en 2006.
La réorganisation des établissements de Blois-Centre transforma enfin l’institution en lycée avec les terminales placées actuellement à l’annexe Victor Dillard depuis la rentrée de 2016.
LE BÂTIMENT PRINCIPAL
L’élément principal du bâtiment se situe au carrefour de plusieurs rues bien connues des blésois : la rue Franciade, la rue de la Paix et la rue du Bourg Neuf. Lieu d’enseignement de renom, il fut longtemps réservé aux garçons avant d’y admettre les filles tant au collège qu’au lycée. Se développa ensuite à Notre-Dame des Aydes devenu lycée, un internat rénové et ouvert, en 2018, non seulement aux garçons mais aussi désormais aux jeunes filles.
Le CDI complètement refait, spacieux et à même de répondre à la curiosité de tous les esprits, permet non seulement de travailler dans une atmosphère calme et studieuse mais aussi d’accueillir des expositions temporaires, voire quelques conférences.
FIGURES MARQUANTES
LE CHANOINE PAUL MILLET
Paul Millet est né le 13 juillet 1832 à Lanthenay, dans une famille de vignerons assez modeste. Dès l’âge de 18 ans, sa vocation affirmée, il intègre le grand séminaire de Blois, dirigé par les jésuites pour y être ordonné prêtre en 1856. En 1859, il crée un patronage destiné aux jeunes garçons du catéchisme, qui deviendra plus tard l’Abeille des Aydes. Deux ans plus tard, il prend la direction du petit séminaire Saint-François au 6, rue Franciade.
En 1868, il crée l’école Notre-Dame des Aydes, qui offrira une éducation chrétienne aux jeunes garçons de Blois ne se destinant pas au séminaire. Pour cela, il achète une maison située en face du petit séminaire Saint-François. Les premiers élèves, issus du séminaire et de la bourgeoisie chrétienne de Blois, font leur entrée dans les lieux en octobre 1868.
En 1870, Paul Millet est nommé chanoine honoraire, puis chanoine titulaire du chapitre cathédral en 1871. La direction de Notre-Dame des Aydes, qu’il mène jusqu’en 1888, devient indépendante du séminaire Saint-François en 1884. Quelques années plus tard, Paul Millet devient supérieur du grand séminaire de Blois, puis vicaire général honoraire. Il décède le 13 décembre 1900 au grand séminaire de la rue du Prêche, à Blois.
LE PÈRE VICTOR DILLARD
Né le 24 décembre 1897 à Blois, il fut élève de Notre-Dame des Aydes durant douze ans. Il y apprit à parler couramment l’allemand et l’anglais. Reçu bachelier en 1916, suite à la disparition de son frère mort au combat, il s’engagea volontairement dans la Première Guerre mondiale. Il fut plusieurs fois blessé et obtint le grade de capitaine à la fin du conflit.
L’appel de Dieu l’orienta vers un cursus éducatif chez les Jésuites et, parallèlement, il passa ses vacances à réaliser des interviews – E. de Valera, F.D. Roosevelt, entre autres – et des reportages remarqués. Ordonné prêtre à Blois en 1931, il célébra une première messe dans la chapelle de Notre-Dame des Aydes en 1931 et termina ses études en Autriche. Éducateur, professeur de philosophie, il publia Les Lettres à Jean-Pierre.
La Seconde Guerre mondiale l’incita à reprendre du service comme officier aumônier. Fait prisonnier, il fonda une université des barbelés pour ses compagnons de captivité. Sur le chemin de l’Allemagne, il parvint à s’évader, rentra à Paris où ses supérieurs l’envoyèrent en zone libre à Vichy. Il y soutint plus tard une thèse d’économie et organisa des cours du soir qui le mirent en danger. Ne se résignant pas à voir partir sans secours les jeunes du STO, il proposa à ses supérieurs de s’engager volontaire au Service du Travail Obligatoire pour les suivre en Allemagne malgré les risque énormes qu’il savait encourir en raison des persécutions des religieux par les Nazis. Il partit donc à Wuppertal comme prêtre ouvrier électricien. Sa présence et son aide spirituelle marquèrent autant les ouvriers que les populations locales.
Dénoncé puis arrêté par la Gestapo en 1945, il fut déporté au camp de Dachau où il mourut malade et affaibli. Sa personnalité marqua tellement les Allemands de Wuppertal qu’une délégation offrit un grand médaillon de bronze le représentant, apposé dans la cour d’honneur de Notre-Dame des Aydes depuis 2006.
Sa biographie est disponible grâce au livre de Monseigneur Philippe Verrier, publié en 2005, sous le titre : Le P. Victor Dillard, Jésuite mort à Dachau en 1945.
À l’occasion des 150 ans du lycée, des élèves de terminale, encadrés par Vincent Bobillot, enseignant d’histoire-géographie, réalisèrent une vidéo sur la vie du Père Victor Dillard.
LE BIENHEUREUX CHRISTOPHE LEBRETON
Christophe naît à Blois le 11 octobre 1950, septième d’une famille de douze enfants. En 1965, il intègre le petit séminaire Saint-François et la classe de seconde à Notre-Dame.
Malgré un parcours mouvementé, Christophe restera fidèle à ce “Je t’aime” qui figure dans ses notes. Son sens de la poésie soutiendra sa prière. Son désir d’aller vers les pauvres, sa rencontre avec le peuple algérien seront des axes importants de son engagement. En 1972, ses examens terminés, il décide d’être religieux. Sa rencontre avec des Petits Frères de Jésus, des prêtres du diocèse d’Alger ainsi qu’une retraite à Tibhirine vont le marquer profondément.
En 1973, il choisit Notre-Dame de Tamié, abbaye trappiste de Savoie, pour faire son noviciat, puis retourna à Tibhirine y prononcer ses vœux le 31 décembre 1976. Quelques années plus tard, répondant à un appel pour le monastère de Tibhirine, il y fut ordonné prêtre le 1er janvier 1990.
A partir de 1991, la violence se déchaîne en Algérie. La question de la présence des moines en Algérie est posée une première fois. La réponse sera toujours la même : vivre avec les associés du monastère, c’est-à-dire les paysans voisins qui travaillent avec les moines. En 1994 et 1995, les assassinats de religieux et religieuses se multiplient.
Dans la nuit du 26 au 27 mars 1996, Christian et Bruno, des moines de Fès en visite ainsi que Luc, Michel, Célestin, Paul et Christophe sont enlevés. Le 21 mai, seules leurs têtes sont retrouvées et inhumées au jardin du monastère. Le 27 janvier 2018, le pape François les déclare, avec douze autres, bienheureux martyrs d’Algérie.
Chaque année, les garçons du Lycée Notre-Dame des Aydes qui le souhaitent, partent en retraite à Tamié, dans les pas de Christophe Lebreton. Une vidéo a été réalisée à cette occasion en 2017.
MONSEIGNEUR CLAUDE PICARD
Né le 2 décembre 1925, Monseigneur Claude Picard fut le dernier prêtre directeur (1963-1987) de Notre-Dame des Aydes.
Il suivit les cours à Notre-Dame des Aydes en tant qu’interne dès ses six ans. Il fit ensuite des études de philosophie et de mathématiques avant d’être ordonné prêtre à Blois en 1949. Il fut nommé vicaire à Droué pour un an. De 1957 à 1963, il enseigne à Notre-Dame des Aydes les mathématiques et la philosophie.
De 1963 à 1987, il prend la charge de directeur de l’établissement, période au cours de laquelle l’effectif a largement triplé. Avec la signature des contrats avec l’Etat, les constructions rue Franciade en 1966, rue de la Paix en 1977, les annexes – Saint-François en 1970, Victor-Dillard en 1981 -, l’école poursuit son développement plus rapidement que pendant les 100 premières années.
Cette période est également le témoin de la laïcisation du corps professoral, son rajeunissement, puis son vieillissement, lié à sa stabilité. Convaincu que l’école-entreprise doit posséder des lieux institutionnels d’échanges de vues, il met en place les diverses institutions représentatives du personnel : comité d’entreprise, délégués du personnel.
Il est vicaire général du diocèse de Blois de 1991 à 1999, puis chancelier de 1999 à 2006. Il est également chevalier de la Légion d’honneur et prélat de Sa Sainteté.